La convocation du Président Cellou Dalein Diallo par la Cour de Répression des Infractions Economiques et Financières (CRIEF) ne laisse pas indifférents les acteurs sociopolitiques du pays. Cette fois c’est le tour du leader du parti Guinée pour la Démocratie et l’Equilibre (GDE) de rompre le silence. Aboubacar Soumah entrevoit dans la démarche des autorités actuelles une volonté d’humiliation vis-à-vis des cadres du pays parmi lesquels figure en bonne place l’ancien Premier Ministre sous Lansana Conté. « Je suis l’un des témoins vivants de cette situation. J’avoue que j’ai peur pour mon pays et pour mon peuple. J’ai peur lorsque la Guinée doit encore se transformer en cimetière pour ses intellectuels. J’ai peur pour mon pays quand je le voie redevenir le pays de la raison du plus fort. J’ai peur pour mon pays lorsque la justice peut être autre qu’indépendante. J’ai peur pour mon pays lorsque les fils dignes qui, à un moment donné, se sont sacrifiés pour apporter leur modeste contribution au développement socioéconomique de notre pays, au lieu d’être récompensés positivement, se retrouvent dans des situations misérables d’humiliation », a-t-il déploré chez nos confrères de l’émission Mirador de Fim fm.
Poursuivant, le Président du parti GDE rappel qu’avant la liquidation de la compagnie Air Guinée, deux autres avions avaient été vendus alors que Cellou Dalein Diallo n’était pas encore nommé au poste du Ministre des Transports. Mais curieusement personne ne parle de ces deux flottes. Plus loin, Aboubacar Soumah s’étonne de constater que ni l’acheteur, ni le ou les vendeurs ne soient incriminés dans cette affaire dont il situe ainsi le contexte : « J’avoue que Cellou Dalein Diallo, avant d’être à la tête du ministère des transports, la Guinée avait des Boeing. Deux de ces Boeing avaient été achetés par la république du Nigéria et Cellou n’était pas encore ministre des transports. Le ministère qui engage l’Etat guinéen sur le plan économique et financier c’est celui de l’économie et des finances. En plus du Ministère de l’Economie et des Finances, après le discours programme du 22 décembre 1985, il y a eu la création d’un organe appelé Cellule de Privatisation qui s’occupait de la privatisation de toutes les unités industrielles existantes, les entreprises d’Etat et autres. Tout simplement parce que nous avions changé de système économique. Du centralisme économique nous sommes allés vers le libéralisme. Or, les principes de l’un ne peuvent pas fonctionner dans l’autre. C’est dans ce cadre que des bailleurs de fonds ont conseillé la Guinée de se débarrasser de Air Guinée », rappelle Aboubacar Soumah.
A en croire l’ancien député du régime Alpha Condé, Air Guinée était devenue une compagnie non rentable. La seule option crédible qui s’offrait ainsi à l’Etat guinéen était la vente. Pour monsieur Soumah cette opération n’avait rien d’illégale : « Tout ça parce que cette structure qu’on appelait maintenant Air Guinée n’était plus qu’une structure budgétivore. La compagnie consommait plus qu’elle ne faisait rentrer dans les caisses. Donc l’entretien des avions ne pouvait pas être assuré. L’entretien du personnel ne pouvait pas être assuré. Celui des aéroports régionaux ne pouvait pas non plus être assuré. Pas seulement Air Guinée ; même les 114 entreprises dont on parle avaient leurs tableaux de bord financier au rouge (…). A part les entreprisses mixtes comme la CBG et FRIGUIA, aucune autre ne répondait aux critères économiques et commerciaux. Donc il fallait les vendre. Et les lois guinéennes autorisent l’Etat guinéen à vendre un de ses biens. Donc Cellou Dalein, en tant que ministre des transports chargé de la régulation aérienne, n’avait signé ce document que dans ce cadre là ».
Toujours au micro de nos confrères, l’ex député dit comprendre la volonté de moralisation du pays manifestée par la junte au pouvoir. Mais pour lui cela devrait commencer par les dossiers les plus récents. « Si nous voulons moraliser de manière honnête et patriotique ce pays ; au lieu d’aller réveiller les morts d’il y a 30ans ou 40ans, pourquoi ne pas s’occuper de ce que nous venons de vivre. Qui n’a pas appris ne serait-ce qu’à travers les medias la situation de l’EDG ? Qui n’a pas appris à travers les medias les 150millions de dollars payés par l’Angola ? Qui n’a pas appris par les médias les plus de 300millions payés par l’Afrique du Sud ? Qui n’a pas appris l’interception d’un montant de 20millions de dollars à Dakar en provenance de Conakry ? Qui n’a pas appris l’obtention des 750millions de dollars du groupe Rio Tinto ? Si nous voulons interroger les régimes de Sékou Touré ou de Lansana Conté, je suis d’accord. Mais ce qui est récents et pour lesquels ont n’a pas beaucoup d’efforts à fournir, commençons par ça. Parce que beaucoup de ministres qui incarnaient le régime de Sékou et de Conté ne sont plus de ce monde et il va être plus que difficile de dépoussiérer tout ces dossiers là », conclu-t-il.