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Tribune : objectif zéro Etablissement Public à caractère Administration du gouvernement guinéen courant 2023. Mon avis là-dessus (Par Mohamed Lamine Camara, MOLAC)

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Le jeudi 02 février 2023 de 10 h à 12 h, sous la Haute Autorité de son Excellence Monsieur le Président du CNRD, Président de la Transition, Chef de l’État, Chef Suprême des Armées, le Colonel Mamadi Doumbouya, le Ministre Directeur de Cabinet de la Présidence de la République a informé le Conseil que dans le cadre de la refondation de l’État et de la Rectification Institutionnelle, la vision du CNRD et celle du Président de la Transition et du Gouvernement sont d’atteindre l’objectif Zéro EPA en 2023. Cette décision s’expliquant par le constat selon lequel, plusieurs d’entre elles coûtent plus chères à l’État et ne rapportent quasiment rien en retour au budget national. »

Les Etablissements Publics à caractère Administratif (EPA) sont en général des personnes morales de droit public, dotés de l’autonomie financière et de gestion, ayant reçu de l’Etat, un patrimoine d’affectation en vue de la réalisation d’une mission d’intérêt général. Ils ne peuvent exercer à titre principal aucune activité industrielle et commerciale. Leurs ressources financières sont constituées principalement de subventions du budget de l’Etat et, accessoirement, de recettes diverses (un EPA ne peut, ni emprunter, ni prêter). Ils sont donc régis par la loi portant gouvernance des sociétés et établissements publics de l’Etat et leur régime financier est encadré par la loi organique relative aux lois de finances et le règlement général sur la gestion budgétaire et la comptabilité publique. Ils sont en quelque sorte des organismes publics dont l’activité est principalement administrative et les ressources proviennent majoritairement du budget de l’Etat.

En Guinée, ils sont classés suivant quatre principaux domaines d’intervention. Il y a donc :

  1. Les EPA pour la promotion de la bonne gouvernance au service du développement durable ;
  2. Les EPA pour la transformation économique durable et inclusive. Autour de 19, ils sont répartis entre les secteurs des Transports, de l’Energie et l’Hydraulique, de la Pêche, des

Télécoms, de l’Agriculture, des Mines et de l’Habitat ;

  1. Les EPA pour le développement inclusif du capital humain. Ils ont la particularité de couvrir les secteurs sociaux (action sociale, santé, jeunesse et emploi des jeunes, éducation et formation) ;
  2. Les EPA pour la gestion durable du capital naturel. Ces derniers évoluent dans le domaine de la gestion des écosystèmes terrestres, des océans et des ressources marines, du cadre de vie et des changements climatiques.

Cette classification, prouve-t-elle à suffisance, combien de fois les EPA peuvent être utiles dans le processus de développement de la Guinée ? C’est pourquoi, de mon avis légitime d’analyste, je trouve que leur suppression n’est pas la solution qui se veut l’émergence rapide. Elle pourra plutôt dénoter un recul de l’Etat et sa violation de ses propres lois. Sans ambiguïté, ni amalgame, je m’explique. La Guinée est engagée dans un grand chantier de refondation de l’Etat, ce qui à mon avis nécessite par ses dirigeants, la transformation des habitudes, des aptitudes, des attitudes anciennes mal saines ou révolues de fonctionnement de tout ce qui trame la classe politique et administrative de la nation. Faut-il rappeler alors que pour ce qui concerne les EPA, l’Etat assure une double tutelle sur les Établissements Publics Administratifs ? D’abord, il assure la tutelle technique exercée par les ministères sectoriels portant sur le respect des dispositions relatives à la mission de ces organismes publics. Et quant à la tutelle financière, elle est exercée sur l’ensemble des EPA de l’Etat par le Ministre du Budget. Dans le cadre de cette mission ou responsabilité, le pays Ministre du Budget est chargé, conjointement avec les Ministres sectoriels concernés, d’approuver les budgets et les comptes annuels de ceux-ci. Ceci dit donc, pour améliorer la gestion des EPA de l’Etat en République de Guinée, le Gouvernement devra absolument au lieu de les supprimer pour les raisons évoquées, s’engager à mieux les encadrer, en vue de leur permettre d’assurer pleinement la mission de service public qui leur est assignée.

Au lieu de supprimer les EPA en Guinée, il faudra plutôt s’attaquer aux insuffisances qui constituent des obstacles à l’accomplissement de la mission qui leur est assignée. Ces insuffisances peut-être liées par exemple à:

-L’inexistence de certains textes d’application liés notamment à la gouvernance des Établissements Publics Administratifs ;

-La faiblesse des mécanismes de supervision et de contrôle due à l’absence de Conseils d’Administration dans la plupart des établissements ;

-Le manque d’encadrement et de formalisation de la transmission des documents financiers et de gestion à la tutelle financière ;

-L’absence de manuel de procédures administrative, financière et comptable au sein de plusieurs de ces établissements ;

-Le problème de choix des hommes appelés à prendre la direction des EPA, leurs capacités relationnelles et réactionnaires à réfléchir, créer, adapter, innover et inventer des solutions liées aux problèmes de leur raison d’exister.

Ces insuffisances peuvent en grande partie être corrigées par exemple par :

  1. L’institutionnalisation de la Revue Annuelle des Établissements Publics Administratifs de l’Etat en République de Guinée ;
  2. La création au Ministère du Budget d’un service dédié chargé du suivi des Établissements Publics Administratifs de l’Etat en République de Guinée et la création d’un pôle de Directeurs Généraux de ceux-ci ;
  3. La transmission des rapports d’activité nés de l’exécution de leurs différents plans d’actions annuels et des comptes financiers certifiés et approuvés par les Conseils d’administration aux ministères qui assurent les tutelles techniques et financières. Il reviendra à celles-ci de les évaluer et vérifier respectivement, puis en tirer les conséquences. Il peut être envisagé des recommandations, des réadaptations, des redéfinitions d’attribution, et même des restructurations. Mais pas la suppression.
  4. La révision des procédures de recrutement et de nomination des Directeurs des EPA. Faut-il rappeler que les institutions ne valent que ce que les hommes veulent qu’elles deviennent ? Il faudra absolument des hommes qu’il faut aux différents postes sensibles.

Pour terminer, je suis de ceux qui partagent l’idée de compression des dépenses de l’Etat au profit des investissements porteurs de croissance, même s’il faut fusionner certains EPA ayant les mêmes attributions. C’est d’ailleurs en cela que je consomme le mot “Suppression”. C’est aussi en cela que la vision de l’Etat pourra être qualifiée de condition essentielle de rattrapage du grand retard de développement de la Guinée, accumulé depuis des années.

Par Mohamed Lamine Camara (MOLAC)

Analyste financier

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