L’annonce de l’attaque d’un convoi transportant la bagatelle de GNF 21 Mds le 12 avril dernier continue à secouer les milieux économiques et sécuritaires. Selon la BCRG, cette somme, en billets neufs de GNF 20 000, a été emportée par des assaillants en cabale. Aussitôt informée par courrier, la BCRG affirme avoir mis en place un comité de crise piloté par le Gouverneur en personne. Ce comité a ainsi pris toutes les dispositions idoines pour identifier et arrêter les auteurs de cette attaque. L’objectif ultime étant de retrouver les fonds. La BCRG appelle à la vigilance des citoyens et des acteurs du secteur financier en particulier afin de signaler l’apparition soudaine de grosses quantités de billets neufs de GNF 20 000. Et cela pour éviter la mise en circulation anormale de ces billets sur le marché.
Cette opération abracadabrante intrigue plus d’un. L’optimisme affiché par la BCRG de retrouver les fonds volés suscite l’interrogation. Quel sera d’ailleurs l’impact de la vigilance de la population surtout que la série des billets dérobés n’est pas connue du public ? Ce vol porte-t-il sur des nouveaux billets série 2024 ? Ou bien s’agit-il des nouveaux billets d’une des séries antérieures mais qui n’avaient pas été encore mis en circulation ? voilà tant de questions qui laissent planer le doute quant à l’efficacité de cette demande.
De plus, après moulte réflexion, nous restons sur notre faim quant à l’efficacité des mesures prises pour isoler ces billets. Car même si le vol porte sur des nouveaux billets dont les numéros de séries sont déjà remontés aux autorités compétentes, il y a encore du pain sur la planche. Même si ces informations sensibles sont partagées avec le système financier, stations-service, commerces, rien ne dit que la tâche sera facile.
Aussi, la forte prédominance du secteur informel (dont les agents économiques, qui stockent des milliards de GNF, ne sont pas forcément formés), laisse plus d’un observateur perplexe. Il sera difficile de retrouver ces fonds malgré la bonne volonté des autorités.
Au cas où elle décidait de neutraliser la série volée, elle pourrait également se heurter à quelques difficultés. Entre autres si les banques primaires ne prennent pas toutes les dispositions à leur niveau. Ou encore l’absence d’outils permettant de détecter facilement et rapidement ces billets.
De plus, toute tentative qui consiste à collaborer avec les plateformes comme Orange Money, Mobile Money, et bien d’autres, dans le but de détecter les dépôts suspects dans les zones environnants du lieu d’attaque mais, aussi tracer les agents économiques qui effectuent des opérations atypiques aura plus ou moins d’impact. Surtout que, les établissements de transfert d’argent ne permettent pas de détecter les quantités des billets déposés. Il sera ainsi très difficile de limiter lesdits dépôts et/ou d’épingler les incriminés en cas de doute. Les billets peuvent changer de main à tout moment.
Dès lors, il faut renforcer la surveillance sur le terrain afin de permettre aux forces de sécurité d’identifier toute opération douteuse. Aussi, la BCRG peut procéder à une vérification sur des dépôts inhabituels de billets de GNF 20 000 dans les guichets des grandes agences des banques primaires. Dans le même sillage, elle peut proposer de récompenser toute alerte susceptible de permettre aux enquêteurs de mettre main sur le grappin.
Par ailleurs, si on veut éviter que des telles pratiques ne se produisent à nouveau, la banque des banques doit réviser le protocole de transport des billets (ajout de balises GPS, drones, escorte militaire etc.). Surtout pour des gros montants en tant qu’institut d’émission même si l’argent n’appartient pas à l’Etat à l’image du cas présent.
De la même manière que la BCRG a réagi promptement à cette situation, son comité de crise devrait se réunir régulièrement pour produire un rapport confidentiel en temps réel. Même si une enquête exige toujours le silence, l’opinion publique, inquiète de la suite des événements, a droit à l’information.
Safayiou DIALLO, Economiste