Attendus depuis un mois, les résultats de l’enquête sur les abus sexuels dans un centre de formation de la Fédération guinéenne de football (Féguifoot) n’ont toujours pas été rendus publics. Ce 24 juin 2024, RFI dévoile le témoignage d’une ancienne joueuse qui décrit un système pédo-criminel au cœur de la Féguifoot.
En Guinée, ce sont les suites de l’affaire des agressions sexuelles qui pèsent sur la fédération de football. À l’époque, les jeunes footballeuses victimes, dont certaines étaient mineures, bénéficiaient du programme « Championnes », cofinancé par l’Agence française de développement et qui aide à l’émancipation des jeunes filles par le sport.
D’après les témoignages recueillis anonymement pour des raisons évidentes de sécurité, le centre de formation de Nongo à Conakry, où logeaient les bénéficiaires du programme « Championnes », a laissé prospérer un système organisé. Si les enquêtes le confirmaient, cela pourrait s’approcher de la pédocriminalité.
Selon le témoignage d’Awa [le prénom a été changé, NLDR] le centre de formation sélectionnait généralement des mineures, issues de familles pauvres et plus faciles à soumettre. « Les joueuses des fois pleurent. Tu vas leur demander “mais pourquoi tu es triste”. Et elles te racontent un peu : “Si je fais ça, c’est pour mes parents qui ne vivent pas bien. Il faut que j’accepte ça”. »
Selon les informations, les joueuses étaient surtout sélectionnées pour leur apparence physique, plus que pour leurs compétences sportives. En avril, les révélations du journaliste Romain Molina ont conduit à la suspension par la Feguifoot de trois encadrants, dont l’entraîneuse Mariama Diallo, qu’Awa décrit comme une grande manipulatrice.
Des suspensions
Si l’entraîneur Sékouba Camara dit « Nesta », sa remplaçante Mariama Diallo et un troisième encadrant ont été suspendus suite à ces révélations, les témoins soulignent qu’ils ne sont que l’arbre qui cache la forêt. Selon Awa, l’entraîneur Sékouba Camara serait « le pire de tous ».
La jeune footballeuse martèle que ces trois encadrants ne sont que des fusibles. Elle pointe l’exemple d’une joueuse tombée enceinte et d’une autre mineure ayant subi les assauts de plusieurs encadrants qui ont filmé la scène et partagé entre eux la vidéo.
Une autre footballeuse préfère qualifier ces actes de harcèlement sexuel et psychologique plutôt que de violences sexuelles, sans pour autant en minimiser la gravité, tant ces harcèlements étaient permanents et les filles fragilisées par leur précarité. En Guinée, des violences sexuelles sur des enfants comme sur des personnes âgées sont reportées presque chaque semaine dans les médias.
Par :Sidy Yansané, rfi.fr