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Kissidougou/Agriculture : « j’invite l’État à privilégier ceux qui sont déjà dans l’agriculture au lieu d’obliger les ministres à aller dans ce secteur », lance un paysan

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Cheval de bataille des différents gouvernements qui se succèdent depuis l’indépendance, l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire est loin d’être une réalité en République de Guinée pourtant considérée par beaucoup comme un scandale agricole au regard de ses immenses potentialités. Partout dans le pays la nature offre un paysage luxuriant, symbole de la fertilité du sol. Parmi les localités du pays réputées pour la générosité du sol figure Kissidougou, ‘’la région des mille bas-fonds’’.

Arrosée par le fleuve Niandan, long de 190 km et de nombreux cours d’eaux, la Préfecture de Kissidougou se distingue aussi par l’existence d’une multitude de bas-fonds ce qui lui vaut cette autre appellation de ”région des mille bas-fonds”. Cette partie de la Guinée qui n’est pas aussi à l’abri des effets du changement climatique, représente la preuve éloquente du paradoxe qui se dégage entre la faible productivité et les multiples atouts naturels dont elle est dotée. Alors, comment répondre à ce contraste et apporter un nouveau souffle à ce secteur qui en a tant besoin, c’est la tâche qui attend madame Haba Mognima Kpoghomou la désormais Directrice Préfectorale de l’Agriculture et de l’Elevage.

Rencontrée par Confidence224.com, la nouvelle directrice a d’abord remercié les autorités de son département de tutelle pour la promotion de la gent féminine à travers sa nomination tout en les rassurant de son dévouement à accomplir la mission qui est la sienne. Ensuite, parlant des avantages naturels de l’agriculture dans sa région, elle déclare: « je dirais d’abord que Kissidougou est une zone qui bénéficie d’un climat subéquatorial guinéen donc ici la saison sèche est très courte, elle part de mi-novembre à fin mars et le reste de l’année c’est la pluie, ce qui est un avantage pour la production du riz. Je peux aussi parler d’une grande potentialité de domaines agricoles à savoir bas-fonds, plaines et coteaux. Ensuite le plus important de tout ça, c’est la fertilité naturelle des terres donc ici que l’on utilise les engrais ou pas, la terre est toujours fertile », a-t-elle dit au micro de Confidence224.com.

Pourtant, malgré ces avantages cités, l’agriculture à Kissidougou fait face à de nombreuses difficultés à différents niveaux. « Je veux citer d’abord l’inaccessibilité des zones de production et cela entraîne d’énormes pertes à cause des produits périssables, aussi, on a l’insuffisance d’aménagements des domaines agricoles, je n’oublie pas aussi la perturbation climatique qui conduit souvent au non respect du calendrier agricole, en plus il y’a la faible mécanisation de l’agriculture, les prix élevés des intrants mais aussi et surtout les feux de brousse qui emmerdent nos paysans », affirme madame Haba Mognima Kpoghomou.

Notre interlocutrice a préféré se réserver sur l’évaluation de la campagne agricole de cette année qui tire à sa fin en cette période de moisson arguant que les récoltes se poursuivent donc ce serait hâtif de parler d’échec ou de réussite. En revanche elle s’est prononcé sur les perspectives de l’année 2023 en ces termes : « au compte de la nouvelle année nous comptons aller vers les paysans pour évaluer les besoins de formation afin de les outiller en des techniques agricoles plus rentables, nous envisageons aussi d’entamer des négociations avec les institutions de micro finance afin qu’elles revoient à la baisse les taux d’intérêt pour les paysans ; ensuite avec l’appui du gouvernement et de nos partenaires, nous comptons aménager plus de domaines agricoles en même temps procéder au désenclavement de certaines zones de production. Aussi en 2023, nous allons installer nos comptoirs pour une meilleure conservation des semences mais surtout nous allons engager une lutte farouche contre les feux de brousse en complicité avec la direction de l’environnement », a-t-elle conclu.

Sur le terrain, la population agricole, composée de faibles, moyens et gros producteurs, ne cache pas son désarroi face au faible accompagnement de l’État dans ce domaine, ce qui, selon eux, expliquerait l’échec de cette année en termes de productivité. C’est en tout cas ce qu’affirme Mbemba Kourouma, agriculteur en même temps instituteur  à l’école élémentaire de Brouadou située à 10 km de la ville qui déclare : « moi je suis dans l’agriculture depuis la naissance. J’ai fait un champ rizicole de 3 hectares qui n’a pas donné comme souhaité et cela à cause des difficultés qui nous fatiguent ici. Cette année il y’a eu un grand retard dans l’apport des intrants. Ce n’est qu’en fin juillet que les engrais sont venus et cela avait trouvé que nous avions déjà lancé les travaux depuis un mois. Ensuite les prix étaient exorbitants, par exemple un sac de NPK qui se négociait à 200 mille francs l’année passée a grimpé jusqu’à 450 mille et imaginez pour un paysan ce que cela représente. Autre difficulté que nous rencontrons à Kissidougou c’est la présence des zébus peuls maliens qui ravagent tout sur leur passage. Donc j’invite la direction en charge de l’agriculture d’assister les paysans, pour la plupart analphabètes, sur le plan du calendrier agricole », suggère-t-il.

Dans la catégorie des moyens et gros producteurs, les difficultés liées à l’agriculture sont ailleurs. Soutien pour sa part M.Yomba Sanoh, Maire de Kissidougou et agriculteur. Rencontré par la rédaction de Confidence224.com, l’élu a d’abord listé les raisons qui l’ont poussé vers la terre avant de nous présenter son empire agricole : « d’abord je suis dans l’agriculture à travers mes parents et moi-même j’ai compris finalement que la terre de Kissidougou offrait une opportunité aux populations de trouver un chemin vers la richesse, donc je suis venu dans l’agriculture pour lutter à ma manière contre la faim dans ma région. Comme vous remarquez je suis dans tout: pour la riziculture j’ai mis en valeur 15 hectares, pour le manioc cette année j’ai fait 5 hectares, on est même sur la récolte et l’argent engendre me permettra d’entretenir mes plantations où j’ai planté l’anacarde et quelques cacao Mercedes depuis 2014, j’ai aussi les palmiers sur 15 hectares qui progresse bien, ensuite j’ai expérimenté 50 pieds d’espèces d’orangers venus de Bamako », nous a raconté M.Yomba Sanoh.

Poursuivant, le Maire paysan, affirme que les difficultés sont essentiellement au niveau des récoltes : « je veux signaler l’insuffisance des machines moissonneuses batteuses qui sont seulement au nombre de six pour toute la préfecture dont 2 des privées. Donc cette année nous avons frôlé le pire car comme vous savez les récoltes se font à la même période. J’invite l’État à privilégier dans ses appuis, ceux qui sont déjà dans l’agriculture au lieu d’obliger les ministres et autres directeurs à s’intéresser à ce secteur car ce n’est pas tous les ministres qui ont grandi avec les travaux champêtres », a-t-il lancé.

À signaler que Kissidougou est l’un des gros pourvoyeurs en produits maraîchers qui sont drainés vers Conakry, Kankan et Siguiri.

Ousmane Sylla, pour Confidence224.com

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