Home à la une La notion de Démocratie et ses différentes acceptions (Par Joachim Baba Millimouno)

La notion de Démocratie et ses différentes acceptions (Par Joachim Baba Millimouno)

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La démocratie, étant un concept, c’est une idée avant d’être un fait. Expression des idées des hommes qui la conçoivent, tentent de l’appréhender et de la matérialiser, elle correspond à plusieurs caractérisations et connotations, en raison de son existence millénaire. Elle est de l’avis unanime des politologues, sociologiques et historiens, l’expression des réalités socioculturelles et historiques des hommes. En réalité, il y a très peu de point commun entre la démocratie grecque celle pensée par Platon et Périclès et ce que nous convenons de nommer actuellement démocratie. Tout le monde en parle, en ne sachant pas concrètement de quoi il s’agit. Si pour certain c’est tout sauf le mépris des droits de l’homme, pour d’autres ce sont les élections, la décentralisation, l’émergence de la société civile, la gestion concertée, la bonne gouvernance….etc. Face à cette difficile appréhension de la démocratie, nous allons procéder à un exercice définitionnel, en tant que : idéologie, mode de gouvernement, institution sociopolitique et mode de vie.

La démocratie en tant qu’idéologie

La démocratie d’après la célèbre définition d’Abraham Lincoln, “c’est le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple”. Ce qui revient à affirmer avec toute la nuance requise qu’un pays est démocratique lorsque le peuple dispose de la souveraineté, que les gouvernés sont leurs propres gouvernants et que le pouvoir est attribué à l’universalité des citoyens.

C’est par perversion de ces principes idéologiques démocratiques que se sont mis en place la plupart des régimes politiques, les plus abjects comme le fascisme et le nazisme, en passant par les dictatures africaines des lendemains des indépendances, au plus sournois comme le communisme.  En réalité, dans un régime démocratique, contrairement aux autres, dont l’histoire des hommes a toujours fini par avoir raison, la conception du gouvernement du peuple, est non seulement entendu comme le gouvernement issu du peuple, respect du principe à l’autodétermination des peuples oblige, mais aussi comme un gouvernement dont la finalité est la promotion du libre développement du peuple et la consécration de la liberté de chacun des individus qui le composent. Concrètement, c’est une idéologie sous-tendue par les valeurs de promotion de l’individu de consécration de la prééminence de l’Homme tel que le suppose le contrat social de Rousseau. Contrat social, élément fondamental de la définition de la nation moderne. C’est ainsi qu’en tant que principe idéologique politique, la démocratie c’est l’anti-abus et anti-monopolisation du pouvoir. Mieux c’est la séparation des trois pouvoirs fondamentaux, de l’Etat, qui comme le disait déjà Montesquieu au 18ème est le seul mécanisme susceptible d’empêcher les dérives inhumaines des pouvoirs politiques et anti-développementaliste des sociétés sans liberté. Aussi, un système politique démocratique devrait-il se caractériser, en référence aux recommandations de Montesquieu par la séparation des trois pouvoirs qui le fondent. Plus précisément, par l’indépendance de l’exécutif, du législatif et du judiciaire.

Cependant, en tant que principe politique, expression des réalités de son époque, permettez-moi de préciser que la démocratie moderne se fonde sur la séparation des cinq pouvoirs fondamentaux de l’Etat moderne que sont l’exécutif, le législatif, le judiciaire, les médias et la société civile. Et qui sont imbriquées dans un mécanisme de contrôle mutuel et de collaboration paisible et règlementée. C’est également un système politique bipolaire caractérisé par un débat fructueux et concurrentiel entre la mouvance et l’opposition, symbole du débat démocratique, garant de l’alternance démocratique et incarnation de la libre participation à la gestion de la chose publique.

S’il est vrai que définir la démocratie comme idéologie permet de dire ce qu’elle devrait être et ce qu’elle n’est pas ; il n’en demeure pas moins vrai que cette définition rend difficilement compte de la réalité démocratique et soumet la matérialisation des systèmes démocratiques à des dérives inhumaines et antidémocratiques. Comme ce fut le cas des Etats africains des lendemains des indépendances, où le mépris et l’avilissement de l’individu et des peuples étaient la règle d’or. Heureusement, que la supercherie fut de très courte durée, et que le peuple véritable détenteur du pouvoir a pris sa destinée en main en réclamant à corps et à cri la mise en place d’une véritable démocratie qui plus qu’une idée, est un mode de gouvernement et un mode de vie.

La démocratie en tant que mode de gouvernement

En tant que mode de gouvernement, la démocratie actuelle serait donc ce système qui se fonde sur la séparation et la collaboration de ces cinq pouvoirs ci-dessus cités et qui se caractérise par la permanence et la réalité d’un dialogue libre et règlementé entre gouvernants, entre gouvernés, entre gouvernés et gouvernants, entre mouvance et opposition,….etc, dans un environnement concurrentiel positif. A ce titre, en tant que structure gouvernemental, la démocratie ” répond à trois conditions indispensables :

1- Une concurrence significative et intensive entre les individus et les groupes organisés pour tous postes effectifs de pouvoirs, à intervalle régulier et excluant l’utilisation de la force ;

2 – un haut niveau d’inclusivité de la participation politique dans la sélection des dirigeants et de la définition de la politique, du moins au moyen d’élections libres et transparentes, afin qu’aucun groupe social d’âge majeur n’en soit exclu ;

3 – et un niveau de libertés civiles et politiques le tout suffisamment pour s’assurer de l’intégrité de la concurrence et de la participation politique “.

En tant qu’institution sociopolitique

C’est un système qui privilégiant le dialogue et la participation de tous, se caractérise par le partage géographique du pouvoir, par le rapprochement des gouvernants des gouvernés et par la restitution progressive du pouvoir politique au peuple. Ce, par les mécanismes de la décentralisation et de l’aménagement de l’expression directe ou indirecte du peuple (vote, pétition, libertés d’association …etc.).

La démocratie en tant que mode vie

En tant que mode de vie c’est un ensemble de valeurs dont doit s’approprier toute société aux ambitions démocratiques. Valeurs promues par les différentes composantes sociales à travers un travail d’éducation civique et politique permanent. Ce travail éducationnel est d’autant plus indispensable, car, à la différence des autres régimes et systèmes politiques, la démocratie doit continuellement être approuvée par les citoyens. L’ordre démocratique vit du consensus et de son acceptation en tant que valeur et institution. Il se fonde sur une participation soutenue des acteurs sociopolitiques à la construction et au renforcement de l’Etat de droit. Ce, en adaptant de manière consensuelle les textes de lois aux évolutions de l’Etat et à ses nouvelles perspectives. Il est important de préciser que le consensus démocratique se fonde sur la loi de la majorité et la légitimation par la minorité des désidératas de la majorité

Il est important de préciser que le droit, pierre angulaire de la démocratie, ne peut perdurer sans légitimité, et l’ordre juridique, qu’il induit, expression du respect des droits de l’Homme, sans éthique. Mieux, en tant que mode de vie, la démocratie c’est un système sociopolitique régi par une harmonie entre les libertés individuelles et la solidarité, fondement et finalité des nations modernes, essence et garant de la promotion de l’individu, et de la consécration de l’homme.

Joachim Baba Millimouno

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