En cette période transitoire l’heure doit être à la révision de notre passé commun. Jamais il n’y a d’opinion, d’obédience qu’elle soit politique, communautaire ou confessionnelle qui soit opposée à ce que les guinéens se retrouvent autour d’une même table pour revisiter leur histoire commune. Le passé de la Guinée post-indépendante est loin d’être un long fleuve tranquille. Nous sommes, à dire vrai, un pays dont l’histoire politique est émaillée de sang, de beaucoup de sang. Pire, aucune vérité, aucun pardon et encore moins aucune justice, n’ont été manifestés afin de tourner en toute bonne fois ces pages oh combien douloureuses de l’histoire de notre pays. Encore une fois, il est plus qu’impérieux que les fils et filles de ce pays se retrouvent pour questionner leur passé et concocter des mécanismes devant permettre d’éviter à l’avenir à la Guinée de replonger dans les même travers.
En revanche, autant il est nécessaire de se retrouver et discuter, autant il est vital d’y mettre de l’intelligence dans l’approche méthodologique empruntée. Il s’agit d’un acte hautement historique tant et si bien que lorsqu’on s’y trompe dans la méthode, on ira assurément vers le fiasco que nul ne souhaite. Or ces justement le gout que renvoient les Assises Nationales initiées par les autorités actuelles. L’amateurisme dans la mise en œuvre des dites assises se passe de commentaire. Voyons ! A seulement quelques heures du démarrage des travaux de ces assises, nul ne connais dans l’opinion la ou les figures qui ont la charge de les piloter. Pour un travail aussi sérieux, il importe que les guinéens sachent quelles sont les personnalités commises à cette tache tant noble qu’exaltante. Il s’agit quand-même de l’histoire douloureuse de toute une nation, ne l’oublions pas. Ensuite, à quelques heures de ces assises aucun invité, aucun acteur n’en dispose concrètement des Termes De Référence (TDR). Par conséquent on ne sait pas quels vont en être le déroulé, le calendrier, les intervenants, les objectifs et résultats attendus. Encore plus grave, nulle part dans la communication des organisateurs et du gouvernement par ricochet il n’est fait mention de la justice. Par quel miracle peut-on résoudre un problème aussi profond, aussi obscur et meurtrier sans faire mention de la justice ? Nous pensons que la responsabilité historique exige de chacun de nous d’être sérieux un temps soit peu. Les assises autour des crimes de sang doivent se faire en concertation avec l’ensemble des parties prenantes. Dans une transition et sur des questions liées à la vie de la nation, l’exclusionisme ne doit aucunement être le modus operandi. De l’amont en avale de nos actions doit se situer l’implication de chaque acteur de la question. Or, nous sommes au regret de remarquer qu’une certaine allergie à l’inclusion caractérise les actions du CNRD et du gouvernement actuel. Ce qui hélas fait de ces assises précises, un bébé mal né. Aucune préparation lisible, aucune concertation, aucune implication sérieuse d’acteurs, pas mêmes les victimes, n’ont été prises en compte dans ce processus.
Par ailleurs si débat il y avait eu autour du sujet, l’on trouverait même qu’il est inopportun (pour ne pas dire superflu) d’ouvrir une quelconque assise en ce moment précis ; d’autant plus qu’un travail formidablement documenté et riche d’expérience et de recommandation avait déjà été abattu par la commission provisoire de réconciliation nationale. Il s’agissait d’une commission représentative, dirigée par nos deux grands leaders religieux et qui avait bénéficié de l’accompagnement technique et financier de nos partenaires bi et multilatéraux. Beaucoup d’efforts, de ressources et de temps avaient été consentis et qui avaient permis à l’époque à cette commission de produire un résultat aussi satisfaisant. Pourquoi ne pas sortir du tiroir le rapport final (qui encore d’actualité) de cette commission pour en appliquer les recommandations ? Cela à mon avis aurait le mérite de nous faire gagner en temps, en ressources et en bonne réputation face aux partenaires qui nous ont accompagnés dans cette aventure historique.
Par Diabaty Doré
Président du parti RPR
Vice-président de l’ANAD